Caribou
Écoutez bien, le Québec peut encore éviter qu’Ottawa intervienne s’il fait simplement ce à quoi il s’était engagé pour protéger le caribou.
C’est ce qu’a déclaré mercredi Steven Guilbeault, critiquant le gouvernement Legault pour sa campagne de peur en évoquant de grosses pertes d’emploi dans le secteur forestier.
Le gouvernement québécois sait très bien qu’avant l’adoption d’un éventuel décret d’urgence, il y aura une consultation, notamment de l’industrie forestière.
Cette consultation définira les régions et les superficies touchées, ainsi que les mesures de soutien pour les communautés affectées, a expliqué le ministre fédéral de l’Environnement et du Changement climatique à La Presse.
« En fait, on fait le travail que le gouvernement du Québec avait promis de faire », a rappelé Guilbeault.
Depuis 2016, le Québec promet un plan de protection du caribou et de son habitat, et en 2022, il s’était engagé à déposer ce plan avant juin 2023.
Le conseil des ministres fédéral a donné son aval mardi pour préparer un décret d’urgence visant à protéger trois hardes de caribous du Québec: celles de Val-d’Or, de Charlevoix et du réservoir Pipmuacan, à cheval sur la Côte-Nord et le Saguenay–Lac-Saint-Jean.
Les hardes de Val-d’Or et de Charlevoix, mises en enclos pour rétablir leur habitat, comptent respectivement neuf et 30 individus.
Celle du Pipmuacan en a moins de 300, rappelle Ottawa.
« Ce n’est pas parce que le cabinet a approuvé ma demande de décret d’urgence que je suis obligé d’aller jusqu’au bout », a précisé le ministre Guilbeault.
Il pourrait y renoncer si le Québec propose rapidement un plan pour éviter la disparition de ces trois hardes très vulnérables.
Pas de « cloche de verre »
Ottawa publiera « dans les prochains jours » les documents soumis à consultation pour préparer le décret d’urgence, a annoncé Guilbeault.
« Il n’y aura pas de cloche de verre », a-t-il assuré.
Divers types d’activités sont permis dans la majorité des mesures de protection de la biodiversité au Canada, sauf dans les parcs nationaux, mais ce n’est pas ce qu’on propose ici.
Le décret interdira uniquement les activités qui menacent directement le rétablissement du caribou, principalement l’exploitation forestière.
Protéger l’habitat du caribou bénéficiera aussi à d’autres espèces en péril, notamment les oiseaux.
Rappelons que le Québec abrite 15 % des populations de caribous forestiers du Canada.
Les changements climatiques et les caribous
Les changements climatiques auront des effets à long terme sur le caribou forestier.
Ils devraient exacerber les perturbations actuelles, qu’elles soient humaines ou naturelles.
Des hivers moins rigoureux et plus d’arbres feuillus pourraient attirer cerfs, orignaux et prédateurs dans l’habitat du caribou.
De plus, des conditions climatiques plus chaudes et plus sèches augmenteront la fréquence et l’ampleur des incendies de forêt, notamment dans la forêt boréale canadienne, perturbant encore plus l’habitat du caribou.
Le déclin du caribou au Québec
2003 : Le caribou forestier est inscrit sur la liste des espèces menacées du Canada.
2005 : Le caribou forestier est désigné comme espèce vulnérable au Québec.
2012 : Ottawa publie un programme de rétablissement du caribou boréal et appelle les provinces à élaborer une stratégie de gestion.
2016 : Québec annonce son plan d’action et s’engage à élaborer une stratégie à long terme pour la gestion des caribous et de leur habitat.
2021 : Québec crée la Commission indépendante sur les caribous forestiers et montagnards, qui conclut en 2022 à l’« urgence d’agir » pour sauver l’espèce.
2022 : Québec s’engage à publier une stratégie complète avant juin 2023.
2024 : Québec annonce des projets pilotes pour la protection de la harde de Charlevoix et celle des caribous montagnards de la Gaspésie.